Le drama Proton
Il faut se calmer avec le #drama #Proton.
Andy Yen le propriétaire de proton, une entreprise proposant des services en ligne (mail, calendrier, drive) respectueux de votre vie privée, a publié un message sur twitter/X expliquant que si il y a 10 ans les démocrates s’opposaient aux dérives des compagnies de la big tech (comprendre les Gafam), la situation est aujourd’hui inverse et ce sont les républicains qui jouent désormais ce rôle, le tout en citant un message de Trump.
Great pick by @realDonaldTrump. 10 years ago, Republicans were the party of big business and Dems stood for the little guys, but today the tables have completely turned. People forget that the current antitrust actions against Big Tech were started under the first Trump admin.
Ce message qui s’apparente clairement à un soutien à Donald Trump, est assez risible lorsqu’on sait que tous les patrons des plus grosses boites de la Tech aux États Unis ont apporté leur soutien servile au milliardaire orange. Il est d’autant plus incompréhensible que Proton étant hébergée en Suisse, l’entreprise est assez à l’abri d’une quelconque influence de l’administration Trump. Quelles sont les motivations d’Andy Yen pour avoir écrit ce message ? Le pense-t-il vraiment ? Souhaite-t-il se mettre à l’abri en cas de coup dur ? Mystère.
Ce que je ne comprends pas non plus ce sont les nombreux messages d’activistes blancs bien portants expliquant que suite à cette déclaration il faut arrêter d’utiliser les services de Proton.
On se calme.
Déjà, ce n’est pas Proton qui est favorable à Trump c’est Andy Yen. Si celui-ci est bien le CEO de l’entreprise, ce n’est pas non plus lui qui décide de tout. Proton est une entreprise dont l’actionnaire majoritaire est une fondation. Au conseil d’administration de cette fondation on retrouve Andy Yen mais aussi avec 4 autres personnes. On peut sans aucun doute affirmer qu’Andy Yen a une énorme influence chez proton mais ce n’est pas lui qui décide de tout. Il y a des gardes fous. En gros, attendez de voir si proton part en sucette après ces déclarations pour décréter que Proton est désormais une entreprise au service des nazis.
Ensuite, déclarer que Proton est désormais à fuir parce que son patron a fait une déclaration de soutien au parti républicain, c’est non seulement faire un procès d’intention à Andy Yen – à la limite pourquoi pas, j’ai jamais été contre un peu de polémique – mais aussi à l’ensemble du staff proton, ce qui est plus discutable.
Enfin, ce drama proton c’est quand même bien un putain de problème de riches. Ça fait 15 ans que je travaille à la promotion et à la diffusion de services sécurisés auprès de militants, journalistes et activistes, que ce soient les services de proton, Tuta, Signal, NextCloud ou d’autres. Proton fournit des services ergonomiques, faciles à utiliser, sécurisés et open source. Si en tant qu’expert en sécurité vivant confortablement dans un pays libre, le fait que le patron de Proton fasse des déclarations pro républicains vous dérange, très bien, quittez proton, franchement je comprends. Cela ne signifie pour autant que tout le monde doit le faire.
Migrer d’un service à un autre prend du temps, nécessite des compétences et n’est pas à la portée de tout le monde. Si vous kiffez changer de messagerie trous les 3 mois, allez-y faites vous plaisir. Mais toutes celles et ceux qui utilisent aujourd’hui Proton n’ont pas forcément les compétences ou les moyens pour migrer de services dès qu’un CEO publie un message sur Twitter. Quelques soient les opinions politiques réelles ou supposées de son patron, les services de proton répondent à ce jour à un réel besoin de nombreux journalistes, militant.es, organisations et médias. Le jour où on aura la certitude que Proton est en train de partir en sucette – et ce sera possible car le code des services de Proton est open source donc auditable – alors oui, il faudra partir. En attendant, ce drama proton est un procès d’intention mal placé qui fait plus de mal à la protection de la vie privée qu’autre chose.
Proton c’est comme les huîtres, c’est pas parce que t’aimes pas qu’il faut en dégoûter les autres.